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Le résumé des événements du premier jour du GLF Accra est disponible ici.
Harouna Abarchi est un gardien de troupeau semi-nomade du Niger. Les membres de sa communauté mènent le bétail là où il peut paître et s’abreuver, selon la saison et la végétation disponible. Leur survie dépend de leur mobilité à travers les territoires d’Afrique de l’Ouest, et cela d’autant plus que les cycles écologiques et météorologiques qu’ils suivent depuis longtemps sont mis à mal par le changement climatique. Les sécheresses, les maladies, les feux de brousse et la difficulté des animaux à se reproduire sont désormais leur quotidien.
L’histoire d’Abarchi illustre parfaitement la liste des difficultés qui font remonter la restauration des écosystèmes dans les priorités locales, nationales et internationales comme solution durable, efficace et peu coûteuse. Cette évolution est due à la prise de conscience que l’accès sécurisé à l’eau, à la nourriture, aux moyens de subsistance, la protection de la biodiversité et l’atténuation face au changement climatique, dépendent avant tout de la santé et de l’état des milieux naturels – dont deux milliards d’hectares ont été dégradés à travers le monde et attendent d’être restaurés.
Les 29 et 30 octobre 2019, le Global Landscapes Forum s’est tenu à Accra, au Ghana pour aborder le sujet de la restauration des écosystèmes dégradés du plus grand continent. Plus de 500 participants se sont rendus à l’International Convention Center, parmi lesquels la Reine du Buganda, l’artiste nommé aux Grammy Awards Rocky Dawuni, les dirigeants des agences des Nations Unies et du gouvernement ghanéen, auxquels se sont joints plus de 5 000 visiteurs en ligne.
Synthétisant la thématique de ces deux jours, « Restauration des paysages d’Afrique : Relier les actes de la base au sommet », le GLFx a été présenté à cette occasion comme une nouvelle initiative émanant du GLF et dont l’objectif est la création de nouvelles sections locales indépendantes. Cette « communauté des communautés », ainsi qualifiée par le directeur général du GLF John Colmey, est pensée pour que les communautés locales se saisissent des outils, de la technologie, des connaissances et du soutien du réseau GLF pour rendre leurs paysages plus résilients.
Après une première journée consacrée aux entreprises, expériences et initiatives locales qui voient le jour dans les villages, les communautés et les villes d’Afrique, la seconde journée du Forum a abordé la question de la restauration africaine dans une perspective plus large, examinant comment elle s’insère dans les priorités nationales et internationales sur le changement climatique. Le Forum s’est ouvert à la suite de la quatrième réunion annuelle des partenaires de l’AFR100 auprès de laquelle 28 pays d’Afrique se sont engagés à restaurer plus de 113 millions d’hectares de terres et d’écosystèmes.
L’image d’un arbre que l’on plante est très symbolique de la restauration des écosystèmes, qui s’inscrit dans la lignée d’initiatives axées sur les arbres, comme le Défi de Bonn (dont l’initiateur, Horst Freiberg est intervenu au Forum) et la Déclaration de New York sur les forêts, donnant toute son importance à la restauration dans les actions mondiales sur le changement climatique.
Mais le sujet de la restauration tend actuellement à s’élargir avec la Décennie des Nations Unies pour la restauration des écosystèmes (2021-2030) qui ajoute d’autres écosystèmes à celui des forêts – les zones sèches et les parcours comme ceux de H. Abarchi, les mangroves, les tourbières, les montagnes et les océans – au programme des restaurations.
« À mon sens, il ne s’agit pas de créer quelque chose de nouveau avec la Décennie pour la restauration des écosystèmes, mais plutôt de rassembler tous les efforts qui ont déjà cours », a commenté Elke Steinmetz, conseillère politique auprès du ministère fédéral allemand pour l’environnement.
Face à la population croissante de l’Afrique (la population d’Afrique subsaharienne devrait doubler d’ici 2050 pour atteindre 2,4 milliards de personnes) la sécurité alimentaire et l’approvisionnement en eau deviennent des sujets pressants de la restauration sur le continent. Cela implique de développer de nouvelles pratiques agricoles, d’adapter les méthodes traditionnelles aux nouvelles conditions, et d’intégrer les problématiques sociales aux questions liées au futur de la production alimentaire.
« Aujourd’hui, il n’est pas normal d’importer du riz et de la nourriture », a affirmé Amath Pathe Sene, chef de l’environnement et du climat en Afrique de l’Ouest et centrale au Fonds international de développement agricole des Nations Unies (FIDA). « Nous avons des terres, nous avons de l’eau, et nous devons changer notre manière de travailler avec les petits exploitants agricoles. Nous devons voir l’agriculture comme un champ d’opportunités… des opportunités pour l’emploi, pour les femmes, pour réduire les inégalités entre les sexes, et surtout pour la jeunesse. »
Afriyie Obeng-Fosu, élue Miss Agriculture Ghana cette année, a insisté sur le besoin qu’ont les jeunes exploitants, dont elle fait partie, d’avoir un accès facilité à des crédits à faibles taux d’intérêt, qui serviront à se procurer des semences, des engrais biologiques, à financer le marketing et des actions de vulgarisation. Violet Awo Amoabeng a fait écho à ce témoignage lors d’une séance plénière entièrement composée de femmes où elle décrivait la naissance de son entreprise Skin Gourmet, qui s’approvisionne en beurre de karité biologique dans le nord du Ghana, un produit en pleine croissance dans le pays, fabriqué à la main en grande partie par les femmes et utilisé dans les soins pour la peau et les cheveux.
« L’Afrique dépend de ressources naturelles qui soutiennent notre économie », a déclaré Musonda Mumba, en charge des écosystèmes terrestres dans le cadre du Programme des Nations Unies pour l’environnement et du Partenariat mondial pour la restauration des paysages forestiers (GPFLR). « Le beurre de karité porte le label L’Oréal tout au long de son parcours, d’un village du Ghana jusqu’à une boutique dans Paris. Voilà notre portée mondiale. Nous sommes un village mondial. »
Le rapprochement de la Décennie des Nations Unies pour la restauration des écosystèmes avec la décennie des Nations Unies pour l’agriculture familiale (2019-2028) a également été évoqué à plusieurs reprises. À l’échelon international, entrecroiser les systèmes alimentaires et les efforts pour l’environnement vise à créer une plateforme plus efficiente pour instiller une volonté politique et attirer des fonds pour la restauration et les petits agriculteurs.
« Nous envisageons ces deux systèmes comme un écosystème agricole global porteur de synergies », a confié Nelson Godfried Agyemang, PDG de la Coalition of Farmers au Ghana. « Nous voulons voir des initiatives portées par les agriculteurs, nous voulons voir les agriculteurs aux commandes. »
Pour les communautés comme celle de H. Abarchi, cette démarche peut, dans l’idéal, se traduire par de meilleures relations avec les communautés d’agriculteurs favorisées par des accords qui déterminent quand et où il peut faire pâturer son bétail, et quand et où les agriculteurs peuvent effectuer des brûlis agricoles responsables sans que les incendies se propagent dans la brousse ; avec l’aide de conservateurs de la biodiversité, grâce à un meilleur soutien scientifique visant à faire coexister durablement le bétail, la faune sauvage et les êtres humains sur les mêmes territoires ; et le soutien des gouvernements nationaux, qui prennent conscience que les déplacements libres entre leurs frontières ne sont pas un choix mais une nécessité pour le pastoralisme.
« [La restauration] doit être ancrée aux niveaux local, infranational et national. C’est là que la véritable action prend tout son sens », a déclaré Stewart Maginnis, directeur monde du groupe de solutions basées sur la nature de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). « Mais je pense que nous devrions adopter le slogan ‘Les résultats nous définissent’. Car c’est ce qui nous fera avancer : de voir un changement réel, des résultats réels sur le terrain. »
« Cette décennie, c’est vous, c’est moi, ce sont les environnements dans lesquels nous vivons et nous évoluons », poursuit M. Mumba. « C’est aussi véritablement la question de notre survie. »
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